9 mars 2016

Besançon, ville horlogère

 

Histoire de l’horlogerie

          En France, l’horlogerie naît au Moyen-Age avec les « arts mécaniques ».
          Les horloges mécaniques se diffusent durant le XIVe siècle et la « profession » horlogère suit différents chemins pour se structurer. Si les moines sont les premiers constructeurs d’horloges de clocher, leur succèdent différentes catégories de constructeurs qui améliorent les outils de mesure du temps. Aux XIVe et XVe siècle, on trouve à la fois des constructeurs savants d’instruments astronomiques, des ingénieurs capables de construire tous types de machines (des engins de chantier aux moulins en passant par les horloges) mais surtout des forgerons et serruriers, qui s’adonnent à la fabrication d’horloges mécaniques.
          Durant le XVIe siècle, ces artisans du métal s’organisent et forment des guildes pour réserver à leurs membres l’exclusivité de la fabrication horlogère. Le phénomène corporatiste est amorcé et se poursuit durant le XVIIe siècle, jusqu’à la révocation de l’Édit de Nantes. Ce choix politique est un fléau pour l’horlogerie française. Une partie des horlogers appartient à la communauté rotestante ; ces artisans fuient les persécutions et se réfugient en Suisse, dans des villes horlogères tels que Neuchâtel, le Locle, la Chaux-de-Fonds.
          L’activité horlogère suisse, renforcée par l’arrivée massive des artisans français, se développe dans ces villes frontalières de la France. Au cours du XVIIIe siècle, l’aire de fabrication déborde la frontière et une industrie horlogère d’abord tributaire de la Suisse va se développer dans la partie française du massif du Jura : le Haut-Doubs.
L’aire de production ne déborde pas « naturellement » jusqu’à Besançon.
          Il faut le contexte révolutionnaire et le négociant suisse Laurent Mégevand pour qu’une industrie horlogère soit implantée de toute pièce dans la capitale comtoise. A cette époque, il n’existe que quelques petits ateliers artisanaux sur le territoire français et l’on importe près de 120.000 montres par an, ce qui représente une dépense considérable pour le pays. Mégevand, implanté au Locle, est menacé d’expulsion par les autorités helvètes pour sa participation aux troubles révolutionnaires. Il connaît des difficultés financières et élabore, pour les résoudre, un projet d’envergure : implanter une industrie horlogère en France, permettant ainsi au pays de produire ses propres montres. Avec ce projet, il s’attire le soutien de Condorcet, Mirabeau, Vergniaud et reçoit officiellement le soutien de l’Etat français le 31 septembre 1790.
          La ville de Besançon est choisie pour sa position sur le canal Rhin-Rhône, son emplacement sur la route de l’horlogerie entre Neuchâtel et Paris, sa proximité avec l’axe Genève-Bâle et avec la zone de production du Haut-Doubs. La proximité avec la Suisse est également un avantage pour inciter les horlogers suisses et leur famille à s’installer à Besançon. Car pour mener à bien son projet, Mégevand doit convaincre une partie de la main-d’oeuvre horlogère suisse de la suivre en France. Il met en place une large campagne de débauchage des travailleurs, distribuant notamment des tracts faisant état des avantages consentis aux futurs travailleurs de la Manufacture Horlogère Bisontine. Cette campagne est un succès, avec près de 2000 helvètes (femmes et enfants compris) installés à Besançon au début du XIXe siècle.
          L’organisation du travail qui avait mis plusieurs décennies à s’établir en Suisse est reproduite sur le territoire bisontin. Le modèle de l’établissage, une production éclatée avec une quarantaine de métiers, où les travailleurs se répartissent les différentes pièces à produire et les multiples phases de confection de la montre.
          La Manufacture connaît rapidement des difficultés. Mégevand annonçait être capable de produire 120.000 montres par an, or la production annuelle atteint à peine 15.000 unités. La faillite est prononcée en 1798. Une large part des horlogers qui avaient suivi Mégevand reste sur le territoire et s’établissent à leur compte, tandis qu’un comptoir d’horlogerie est repris par des affairistes locaux, visant à écouler la production horlogère locale.
          50 ans plus tard, l’industrie bisontine produit à elle seule plus de 90% des montres écoulées sur le marché français et devient rapidement la
« capitale française de l’horlogerie ».
Texte : Manue Cournarie